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FESTIVAL DES JARDINS DE WILLIAM CHRISTIE 3ème

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En réalité pour nous ce n'était que la seconde édition, mais nous commençons à nous sentir comme des habitués. Habitués de William Christie, cela c'est une antienne que je vous ai déjà chantée cent fois : Christie que nous avons connu tout jeune, à Saintes, au tout début de sa carrière... et dont le talent est toujours plus sûr, même s'il a pris, comme nous, quelques ans et quelques rides. Habitués de ses jardins que nous avons découverts avec bonheur un jour de juin 2001 à l'occasion d'un Festival des Jardins, et que nous revoyons avec d'autant plus de plaisir chaque année qu'ils ne cessent de s'embellir. Habitués maintenant de "leur" Festival que nous avions fort apprécié l'an dernier et pour lequel nous n'avions qu'une envie : y retourner. C'est chose faite et comme cette année nous avons "fait l'ouverture", il me faut en parler bien vite pour les heureux mortels qui, se posant la question, auraient la velléité d'y aller à leur tour durant les prochains jours : qu'ils n'hésitent pas, l'édition 2014 est aussi magique que les précédentes.



On retrouve à Thiré, intact, le même bonheur de courir dans les bosquets pour y entendre les musiciens des Arts Florissants (avec William Chistie lui-même ou son fidèle Bryan Feehan, le théorbe "historique" du groupe, ou encore le superbe ténor Paul Agnew) ou des Arts Flo junior, les solistes du Jardin des Voix de l'année ou des années antérieures (Reinoud Van Mechelen, soliste 2011, Elodie Fonnard, 2011 elle aussi, Sean Clayton, soliste 2009 et tant d'autres) ou les musiciens de la Julliard School, qui nous enchantent avec un répertoire toujours inventif et toujours soigneusement adapté au cadre champêtre.


Un joyeux pêle-mêle où l'on croise Michel Lambert (1610-1696), maître de chant et compositeur fort apprécié à la cour de Louis XIV et dont la fille épousera Lully, Sébastien Le Camus (1610-1677), moins connu mais pourtant violoniste, théorbiste et compositeur, surintendant de la musique de la reine Marie-Thérèse et auteur de fort agréables mélodies, on y entend quelques airs des Indes Galantes, des trios de Boislambert, une sonate de Vivaldi et cent autres merveilles, chaque jour renouvelées. Cela se passe, les noms à eux seuls sont promesses d'évasion, au Théâtre de Verdure, au Jardin Rouge, au Mur des Cyclopes, au Jardin Chinois ou encore dans le petit cloître reconstitué à côté du Logis de Thiré. Le vent chante dans les peupliers, les oiseaux accompagnent les flûtes traversières et le zéphyr n'est pas que dans les paroles sucrées qu'égrènent les chanteurs. Ces promenades musicales sont délicieuses, un peu magiques et très rares : des moments qu'il faut savourer doucement, sans arrière-pensée, en se livrant sans contrainte à la magie des ces airs de cour ou de ces canons de taverne qui sont d'un autre temps, mais pourtant si proches de notre sensibilité.


Enfin, le soir, après une pause repas qu'on peut prendre dans la Pépinière ou d'un pique-nique qu'on peut concevoir délicat, au diapason - comme le fut le nôtre avec un foie importé en ligne directe du Périgord, un Montbazillac à damner un évêque et un cake au citron d'anthologie (reconnaissez-là la griffe de notre ami blogueur 100% fin gourmet) - c'est le spectacle sur le miroir d'eau. Un petit lac qui se la joue Versailles en miniature, et offre au concert un décor de conte de fées, tout à fait à propos. Lors du premier week-end, dont nous étions, c'était "Rameau maître à danser" (il fallait bien célébrer dignement le 250e anniversaire de la mort du musicien (1683-1764)) : un pur divertissement composé de deux pièces aussi inédites l'une que l'autre.
La pastorale héroïque Daphnis et Eglé, créée pour égayer les parties de chasse de la cour ne fut, semble-t-il, jamais jouée car la reine s'en offusqua et l'interdit après en avoir vu la générale. L'argument, en un acte, est des plus simples, mais, pour une épouse trompée, des plus énervant : Daphnis et Églé, persuadés de s'aimer d'amitié, partent joyeusement vers le Temple de l'Amitié pour échanger des serments. Or quelle n'est pas leur surprise et leur déception que de se voir refouler par le grand prêtre furibard, tonnerre et éclairs à l'appui, qui leur reproche de ne point s'aimer comme il le faut pour entrer en ces lieux. Après s'être accusés mutuellement de trahison, ils finissent par comprendre, aidés en cela par l'intervention d'un angelot armé d'un arc, que le sentiment qui les lie est amoureux et doit être célébré dans le temple de Cupidon. L'allusion implicite à la liaison entre Louis XV et Madame de Pompadour déplut fort, on l'imagine, à la reine qui sans doute, obtint qu'on remise cette partition au plus profond des placards versaillais.
La deuxième pièce interprétée lors du premier week-end était aussi légère : il s'agissait d'un ballet chanté, commandé à l'occasion de la naissance du duc de Berry, futur Louis XVI, célébrant quant à lui La Naissance d'Osiris. L'oeuvre, on l'imagine, n'a guère été reprise ensuite, et la mise en scène de Thiré était absolument délicieuse : chanteurs et danseurs, costumés avec goût (dans une gamme de teintes passées mais colorées et fort délicatement déclinées : costumes très réussis d'Alain Blanchot) interprétaient, sous la houlette de Sophie Daneman pour la mise en espace et de Françoise Denieau pour la chorégraphie, une charmante pastorale dont l'argument reste vraiment très secondaire !! Un spectacle plein d'esprit, où tout était soigné dans les détails, jusqu'à la distribution de superbes bouquets à toutes les femmes de la scène, apportés dans une brouette par un jardinier très XVIIIè !!


La semaine prochaine le spectacle du soir sera Actéon de Marc-Antoine Charpentier, précédé de pièces de Luly et de De Lalande, encore prétexte à de joyeux et élégants ballets, le miroir d'eau se prêtant à merveille au "divertissement". Tous les soirs, l'église de Thiré accueille aussi les émouvantes "Méditations de l'Aube à la Nuit", les soirées de semaine sont consacrées à des concerts aux chandelles, l'après-midi parfois, on découvre de jeunes talents (je recommande en particulier le joueur d'archi-luth Thomas Dunford qui a un toucher, une musicalité et une finesse de jeu vraiment sublimes. Enfin, nouveauté de l'année, on peut aussi suivre, après les spectacles du week-end, une toute nouvelle initiative "Dans le silence de jardin" où un conteur vous charme par ses dits captivants, "mis en gestes". Quant à la visite des jardins de nuit, après le concert, elle réserve même à ceux qui connaissent les lieux pour les avoir vus de jour, mille surprises vraiment féeriques.


Au point que, si Dieu nous prête vie, l'an prochain nous resterons un peu plus longtemps pour mieux profiter de tout cela. D'autant que le Festival est, du point de vue financier, une "vraie" démocratisation de la musique : les prix défient ici toute concurrence et une telle débauche musicale, d'une telle qualité pour un tarif aussi doux, c'est carrément généreux !


L'an dernier nous avions profité de notre passage à Thiré pour retourner voir les Jardins de la Court d'Aron. Cette année nous avons découvert un jardin plus discret, plus"naturel" quoique très sophistiqué : celui du logis de Chaligny à Sainte Pexine. Je me suis engagée, nous étions sur une propriété privée, à ne pas diffuser mes clichés, mais vous incite vivement à aller en prendre vous-mêmes en allant visiter ces jardins remarquables et très "à échelle humaine", qui ont été, nous a-t-on raconté, restaurés par l'ancien jardinier de l'Elysée. Jardin d'agrément, potager, fruitiers, nymphée, tout incite à la halte et à la rêverie, même le bois qui s'étend derrière le domaine a été aménagé dans ce goût très "savant" qui mêle naturel et rigueur, à l'anglaise et à la française, pour un résultat vraiment original. Le nec plus ultra étant la possibilité de pique-niquer sous la pergola, une longue tonnelle qui conduit jusqu’au bois, couverte de vignes chargées de grappes sombres, de rosiers éclatants et de clématites lumineuses, où tables et fauteuils offrent la halte déjeuner la plus sympathique qu'on puisse imaginer. Prévoyez un panier repas à la hauteur du séjour, parfumé, léger et gouleyant.

La pergola n'étant pas située dans l'enclos de la propriété mais proche du parking et accessible à tous, je n'ai pu résister à vous donner un avant-goût de cette visite pleine de charme.
Vous aurez un aperçu de ces deux jardins extraordinaires dans la bande annonce de l'émission Des Racines et des Ailes du 4/06/2014... qui nous  valu quelques difficultés au moment de réserver, début juillet : c'était la panique à bord ! Mais qu'on se rassure, "la foule" reste mesurée, à cause des contraintes de jauge (oui, on est en plein air, mais il existe tout de même une jauge, imposée par la taille des lieux de replis prévus en cas de pluie... et s'il fait beau ?? Eh bien, on vend quelques places "beau temps"à la dernière minute, à l'entrée du domaine. Une bonne surprise pour ceux qui n'ont pu avoir des places sur internet.



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