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ANGERS ENLUMINURES (1)

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Encore une exposition passionnante : les Trésors enluminés : elle dure jusqu'au 16 mars et se déroule à Angers. Organisée dans le cadre d'un effort de mutualisation qui s'inscrit dans un projet national de recensement des manuscrits enluminés, elle fait partie d'un "triptyque" puisque deux autres expositions du même type ont ainsi été organisées au Musée des Augustins à Toulouse  et au Palais des Beaux-Arts de Lille (terminées toutes deux).


Ces manifestations, menées à l’initiative de l’Institut national d’histoire de l’art, avec le soutien de l’Institut de recherche et d’histoire des textes et la collaboration exceptionnelle de la Bibliothèque nationale de France, permettent d'admirer quelques unes des nos plus belles pièces d'enluminures. Il faut savoir qu'après une exposition de cet acabit, les précieux manuscrits doivent être tenus "au secret" durant au moins trois ans ! Autant dire que ces manifestations n'en sont que plus rares, et donc, plus précieuses.


Celle d'Angers, petite en taille mais admirablement organisée, permettait, on s'en doute, d'admirer les pièces les plus importantes de l'art de la majuscule décorée dans le Val de Loire. De tels trésors trouvent souvent leur origine dans des donations, faites aux musées par de généreux collectionneurs dont la passion a considérablement enrichi les collections nationales. C'est ainsi que seize musées des Pays-de-la-Loire et du Centre ont bénéficié de la générosité de grands collectionneurs comme Thomas Dobrée, Charles Lair, André Frank ou, à Angers, Daniel Duclaux. Parmi la centaine de livres ou de feuillets peints ainsi offerts, soixante-treize des plus beaux ont été rassemblés et montrés au musée des Beaux-Arts d’Angers pour la première fois.


Une mise en espace très originale permettait, à chaque étape, d'admirer des pièces rares et d'en découvrir une projetée dans les moindres détails, dans une fenêtre ménagée au fond de chaque box. Des miniatures de 10 cm de large projetées sur un écran de 2m par 2, la caméra permettant d'en découvrir tous les détails, je vous assure que c'était impressionnant !  Les moines copistes qui ont réalisé ces oeuvres en auraient été hallucinés, tant leur travail, agrandi, reste d'une netteté et d'une précision impressionnantes, chaque lettrine foisonnant de détails inattendus et qu'on découvre avec émerveillement sur l'original après l'avoir vu en grand sur le mur !!!


Par ailleurs, à chaque étape, on pouvait feuilleter, sur un écran tactile, l'intégralité du livre dont été issue une enluminure exposée. Dans une ambiance recueillie, à l'éclairage très doux, on parcourait ainsi les diverses sections :

  • La bible au Moyen-Age
  • Livres d'autel et de chœur
  • Les livres d'heures
  • Les œuvres profanes
  • L'enluminure hors des livres
  • Survivance de l'enluminure

Une section enfin, était consacrée aux collectionneurs, grâce auxquels on admire encore ces œuvres mais qui furent parfois pour eux de vrais barbares. Plus de la moitié des pièces exposées étaient des lettrines ou des pages découpées dans des livres. Ces dépeçages relèvent de pratiques anciennes. Dès le Moyen-Age en effet, des manuscrits abîmés servaient en remploi aux relieurs, tandis que d'autres, luxueux et donc coûteux, étaient divisés lors de successions. L'imprimerie, en rendant obsolète nombre d'ouvrages médiévaux, amplifie dès le XVIème siècle leur mise en vente, parfois au poids, et pas toujours rachetés par des collectionneurs érudits.
Le découpage relève alors souvent d'une pratique dévote : on récupère les lettrines décorées pour en faire des images pieuses ou pour les monter en petits tableaux de dévotion privée. Le reste est impitoyablement jeté ou détruit, comme sans intérêt. D'autres découpeurs pouvaient sévir, qui s'intéressaient à l'histoire de France ou à celle des costumes, et qui trouvaient dans les manuscrits des images "intéressantes" qu'ils tailladaient joyeusement.


Au début du XIXème, on commence de nouveau à apprécier les enluminures, mais, las, le dédain pour les textes anciens et la demande de majuscules peintes et dorées accroissent le dépeçage, jusque dans les plus belles bibliothèques. On rassemble les images dans des albums ou en planches thématiques, et on se débarrasse du texte. Certains n'hésitent pas à créer des œuvres nouvelles en collant leurs coupures dans des livres reconstitués ne comportant que des peintures, voire en les utilisant en encadrement de miroir ou en abats-jours : la translucidité du parchemin inspire les "créateurs". Il s'agit maintenant de reconstituer les ouvrages d'origine et les chercheurs, face à ces massacres, ont fort à faire !! Cela donne parfois lieu à d'exaltantes découvertes, par recoupement, rapprochement et étude détaillée !

A SUIVRE
Enluminures et détails
Le mystère des Livres d'heures

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