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DÉSIRS ET VOLUPTÉ À L'ÉPOQUE VICTORIENNE

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Koka était morte de rire à l'idée que j'aie réservé des entrées au Musée Jacquemard André pour aller visiter "Désirs et Volupté à l'époque victorienne"... persuadée que nous n'y resterions guère plus d'une demie-heure, écœurés par l'excès supposé de guimauve, lié dans nos esprits à cet art mal connu. Alter quant à lui, expliquait à qui voulait l'entendre que c'était vraiment pour satisfaire un caprice incompréhensible de sa tendre mais excentrique moitié qu'il acceptait d'aller visiter ce exposition ! Et pourtant, il a volontiers reconnu que cette découverte des artistes vénérés par l'époque victorienne, artistes que nous connaissons très mal sauf par des a priori toujours un peu simplificateurs, valait le déplacement. C'est grâce à une collection privée, celle de Pérez Simón, que nous avons ainsi "appris"à mieux regarder Lawrence Alma-Tadema, Edward Burne-Jones, John William Godward, Frederick Goodall, Arthur Hughes, Talbot Hughes, Frederic Leighton, Edwin Long, John Everett Millais, Albert Moore, Henry Payne, Charles Edward Perugini, Edward John Poynter, Dante Gabriel Rossetti, Emma Sandys, Simeon Solomon, John Strudwick, John William Waterhouse et William Clarke Wontner... tous noms qui - à part les deux ou trois premiers - n'évoquent pas grand chose pour nous !


Ce qui est, à mon sens, passionnant dans cette exposition, c'est le contraste entre l'Angleterre puritaine du XIXème, d'une rigueur morale frôlant la rigidité, en plein développement industriel avec tout ce que cela suppose d'âpreté de vie, de pauvreté, de manque total de douceur, et cet idéal foisonnant qui célèbre un vrai "culte de la beauté", mêlant le retour à l’Antiquité, un certain rêve médiéval et l'expression poétique du symbolisme. La quête esthétique est le maître-mot de ces artistes qui ont fait de la beauté un absolu et un art de vivre. Le sujet principal de ce mouvement artistique est la femme : dénudée, idéalisée, désirable, lointaine, somptueuse, voluptueuse, la femme de la peinture victorienne n'est entravée par aucune basse contingence matérielle, elle est toute de beauté et de douceur mystérieuse.... une vraie icône !!


Plutôt que de vous infliger de longs développements, il est simple de vous renvoyer au site, très bien fait, du parcours de l'exposition, et de me contenter de vous offrir quelques photos, forcément idylliques, de cette manifestation qui se termine dans quelques jours et qu'il faut vraiment voir si l'on est à Paris. Surtout si l'on est réfractaire, a priori, à ce genre d'expression artistique : en ayant présent à l'esprit que nous le connaissons mal, et pour cause (c'est rare que l'on croise ces peintres dans nos musées) et que nous en avons une vision un peu faussée par la fadeur des reproductions entrevues de-ci, de-là, sans en comprendre l’atmosphère et l’esprit. (les textes en italique sont des citations du site de l'exposition)

Edwin L. Long (1829-1891), La Reine Esther

Esther est une héroïne du peuple hébreu. Epouse choisie par le roi Perse Xerxès Ier, appelé Assuérus dans la tradition biblique, à la suite de la répudiation de sa première femme Vashti, elle intercède auprès de son époux pour sauver son peuple d’un massacre qu’il avait planifié. Résignée et déterminée, Esther est ici figurée dans toute sa beauté, juste avant de se présenter à Assuérus, alors que le roi ne l’y a pas invité. Le moment est dramatique, car quiconque se présente au souverain sans son ordre est condamné à mort. Le dénouement est heureux : ému par son épouse, le roi la sauve ainsi que son peuple.



Henry A. Payne (1868-1940)
La Mer enchantée  Vers 1899


L’inspiration du peintre Henry Arthur Payne provient là encore d’une source littéraire : "The shaving of Shagpat", un conte de George Meredith. Deux héros y luttent contre l’hégémonie d’un tyran. Payne choisit le moment où une enchanteresse s’enfuit à l’approche d’un des deux héros. Elle s’installe dans une coque et se lance sur une mer enchantée, où des corps de femmes la suivent au gré des flots, et où des hommes ensorcelés l’observent de leur bateau. Le visage inquiet de la jeune femme trahit son anxiété à l’idée d’être poursuivie, alors qu’elle ne veut pas être vue des hommes... Un faucon se trouve à ses côtés. Il signale la présence invisible du héros, qui a réussi à s’accrocher à la frêle embarcation.


Sir Lawrence Alma-Tadema (1836-1912), 
Les Roses d'Héliogabale
Le sujet traité ici est un évènement qui se produisit durant le règne éphémère du jeune empereur Héliogabale. Il est rapporté dans L’Histoire Auguste, au début du IV° siècle. L’Empereur, lors d’un banquet, donne l’ordre de lâcher le contenu d’un plafond réversible sur ses convives. Une pluie de pétales de roses se déverse alors sur ses courtisans et plusieurs d’entre eux meurent étouffés. Sur l’estrade, Héliogabale à gauche préside le banquet, entouré de ses proches hilares. A droite, un groupe de femmes parmi lesquelles il y a sûrement la mère et la grand-mère du jeune empereur, qu’elles ont placé sur le trône à la suite d’un complot. Au premier plan, les convives sont encore inconscients du dénouement dramatique. Ce tableau virtuose, à la facture séduisante, cache merveilleusement son jeu. Derrière la beauté : le drame, derrière le raffinement : la cruauté. La figure d’Héliogabale est souvent citée par les auteurs de la décadence, contemporains d’Alma-Tadema, comme l’écrivain Huysmans qui décrit dans A rebours les goûts raffinés et pervers du jeune empereur.


Et si mon enthousiasme n'est pas communicatif, je vous recommande quand même d'aller faire le puzzle ou la partie de cache-cache du coin des enfants, c'est très amusant ! Et chaque fois que vous aurez trouvé une paire, vous découvrirez le tableau dont est issu le sujet, ce qui vous fera une petite visite éclair très agréable !

JEU
Pour finir, je vous propose un petit jeu : les titres sont, dans ce genre pictural, un des éléments clés du style !! A vous de retrouver les titres de ces 4 toiles :  Courtiser sans espoir,  L'absence fait grandir l'amour , Un Nuage passe et Confidence Importune
1
2
3
4


ATTENTION : en-dessous de cette ligne, solution du jeu !! à ne pas franchir si vous avez envie de jouer avant de connaître la réponse
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Solution du jeu :

1 - Arthur Hughes (1832-1915) , Un Nuage passe
Printemps de la vie, printemps de l’amour, avec sa jeunesse et ses joies naissantes mais fragiles. Les coloris, sont traités avec raffinement, en accord avec l’impression de fragilité que le titre suggère : chevelure blond vénitien, robe rose pâle, teinte rousse du setter irlandais. Le chien, symbole de fidélité, semble partager l’inquiétude de sa maitresse. Le décor est celui d’une classe moyenne aisée. La cheminée en porcelaines de Delft, la plaque de biscuit Wedgwood et le miroir convexe semblent tout droit sorti de « the House Beautiful », magazine de décor intérieur lancé en 1896.

2 - Sir Lawrence Alma-Tadema (1836-1912), Confidence importune
La jeune fille de gauche, l'air extatique, est en train de raconter à sa compagne combien elle est amoureuse et combien cet amour est payé de retour. L'autre jeune fille, les yeux baissés, les mains tordues, cache comme elle le peut sa douleur et son désespoir, car, forcément, elle est amoureuse du même jeune homme et les confidences de son amie la mettent au supplice.

3 - Sir Lawrence Alma-Tadema (1836-1912), Un message de l'amour
Deux jeunes femmes encore, sur une terrasse. L'une d'elle, celle de gauche forcément, vient de recevoir un bouquet de roses que son amie respire mélancoliquement, rêvant de pareilles attentions. Sur le banc, un rouleau évoque quelque message tendre, déjà lu et qui sera relu des centaines de fois. L'heureuse bénéficiare de ce message tendre, regarde au loin et rêve à celui qui l'aime et qui a eu pour elle ces attentions charmantes, elle attend impatiemment son retour, elle semble prête à bondir pour le rejoindre.

4 - Sir Lawrence Alma-Tadema (1836-1912), Courtiser sans espoir
Le regard plein d’espoir du jeune homme ne rencontre pas le visage de la jeune femme, qui,  regardant dehors, trahit l’ennui. Au premier plan, un bouquet de roses trémières translucides irradie de lumière. Les vêtements drapés aux savants effets de matière font référence à une antiquité rêvée mais sans qu’aucun objet archéologique ne vienne préciser la date ou le lieu de la scène. Nous sommes hors du temps, hors du monde.

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