Le goût artistique des négociants de Cognac (2)
Au XIXe, à l'époque où se crée le musée et où il se peuple d'oeuvres offertes par les notables du cru, non contents d'offrir des oeuvres correspondant à leur goût pour l'art du Nord de la Renaissance, ces derniers se piquent de faire travailler les artistes locaux. C'est ainsi que les peintres charentais Auguin, Balmette, Germain, Hérisson, Jarraud, Maresté, Péré, Soulard font petit à petit leur entrée dans les collections.
De petits maîtres, ainsi qu'on les appelés ensuite, qui excellaient dans l'art du paysage et dont les toiles évoquent aux bourgeois cognaçais des villégiatures familières : barques au mouillage d'Adolphe Père (Cognac 1873-1926); paisibles bords de Charente, campagne idéalisée aux accents rassurants...
Les achats de ces gens de commerce et de vigne sont aisés pour ces toiles "faciles", qui évoquent un environnement connu et proche, comme cette toile de 1880, «La cale de Cognac après la pluie» d'Henri Germain (Paris, 1842 - Cognac, 1898) ...
ou les arbres du Parc de la ville peints en 1891 avec un réel panache par un bordelais sans doute familier de Cognac, Jean Cabrit (Bordeaux, 1841 - 1907) Huile sur toile, 1892. Des goûts bien classiques, bien "bourgeois" qui permettent sans risque de se piquer d'avoir bon goût et d'apprécier ce que l'on pend à ses murs avant de le léguer au musée !! Ceci dit sans la moindre raillerie, nous n'avons pas affaire à des collectionneurs mais à des négociants soucieux de décorer agréablement leur salle à manger et de prouver à leurs pairs qu'ils apprécient l'art.
D'autres ont recours aux artistes pour portraiturer la famille, leur épouse plus souvent qu'eux-mêmes d'ailleurs. Et les plus fortunés, ont recours pour le faire à des artistes "parisiens", je veux dire par là des peintres reconnus, en vue. Ainsi monsieur Armand Robin-Beauregard qui a commandé à Carolus-Durand (Lille 1838 - Paris 1917) ce mélancolique portrait de son épouse encore jeune...
... et, quelques années plus tard, ses moyens ayant sans doute augmenté, à Benjamin Constant (Paris 1845 - 1902), le portraitiste en vogue en cette fin de siècle. On dit que les portraits par l'artiste se monnayaient fort chers : pensez, il travaillait pour des américains ! Mais il faut bien avouer que Madame Robin-Beauregard est admirablement passée, grâce à lui, à la postérité : il a saisi avec une intuition artistique remarquable, la prestance un peu hautaine du modèle et lui a donné "un chien" qui, sans la trahir, fait oublier son physique assez peu avenant. Les commanditaires furent certainement ravis d'exposer ce portrait en bonne place dans le salon familial.
Un autre, plus inventif ou plus proche des modes parisiennes, n'hésite pas à acheter, à un artiste local certes, mais devenu "parisien" par la reconnaissance de son talent, Alfred Smith (Bordeaux 1853 - Paris 1936) cette Place de la Concorde tout à fait incongrue dans un intérieur charentais mais forcément "tendance" ! Smith qui fut le peintre de Bordeaux le plus adulé du XIXe siècle : et, de fait, cette toile est superbe.
D'autres cognaçais, plus audacieux, donnent carrément dans la mode de l'orientalisme : ce qui vaut au musée cette fort belle toile de Théodore Charles Frère, dit Frère Bey (Paris 1814-1888)...
présentée dans un cadre tout à fait ad hoc et qui dut éblouir les provinciaux qui en apprécièrent tout à loisir l'exotisme et l’originalité : pensez, le désert de Palmyre en Syrie, encadré de motifs arabes : un horizon carrément inhabituel vu des bords de la Charente !!
ou les arbres du Parc de la ville peints en 1891 avec un réel panache par un bordelais sans doute familier de Cognac, Jean Cabrit (Bordeaux, 1841 - 1907) Huile sur toile, 1892. Des goûts bien classiques, bien "bourgeois" qui permettent sans risque de se piquer d'avoir bon goût et d'apprécier ce que l'on pend à ses murs avant de le léguer au musée !! Ceci dit sans la moindre raillerie, nous n'avons pas affaire à des collectionneurs mais à des négociants soucieux de décorer agréablement leur salle à manger et de prouver à leurs pairs qu'ils apprécient l'art.
D'autres ont recours aux artistes pour portraiturer la famille, leur épouse plus souvent qu'eux-mêmes d'ailleurs. Et les plus fortunés, ont recours pour le faire à des artistes "parisiens", je veux dire par là des peintres reconnus, en vue. Ainsi monsieur Armand Robin-Beauregard qui a commandé à Carolus-Durand (Lille 1838 - Paris 1917) ce mélancolique portrait de son épouse encore jeune...
... et, quelques années plus tard, ses moyens ayant sans doute augmenté, à Benjamin Constant (Paris 1845 - 1902), le portraitiste en vogue en cette fin de siècle. On dit que les portraits par l'artiste se monnayaient fort chers : pensez, il travaillait pour des américains ! Mais il faut bien avouer que Madame Robin-Beauregard est admirablement passée, grâce à lui, à la postérité : il a saisi avec une intuition artistique remarquable, la prestance un peu hautaine du modèle et lui a donné "un chien" qui, sans la trahir, fait oublier son physique assez peu avenant. Les commanditaires furent certainement ravis d'exposer ce portrait en bonne place dans le salon familial.
Un autre, plus inventif ou plus proche des modes parisiennes, n'hésite pas à acheter, à un artiste local certes, mais devenu "parisien" par la reconnaissance de son talent, Alfred Smith (Bordeaux 1853 - Paris 1936) cette Place de la Concorde tout à fait incongrue dans un intérieur charentais mais forcément "tendance" ! Smith qui fut le peintre de Bordeaux le plus adulé du XIXe siècle : et, de fait, cette toile est superbe.
D'autres cognaçais, plus audacieux, donnent carrément dans la mode de l'orientalisme : ce qui vaut au musée cette fort belle toile de Théodore Charles Frère, dit Frère Bey (Paris 1814-1888)...
présentée dans un cadre tout à fait ad hoc et qui dut éblouir les provinciaux qui en apprécièrent tout à loisir l'exotisme et l’originalité : pensez, le désert de Palmyre en Syrie, encadré de motifs arabes : un horizon carrément inhabituel vu des bords de la Charente !!
FIN