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POURQUOI LES PEINTRES EN BÂTIMENT SIFFLENT-ILS EN TRAVAILLANT ?

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Il arrive qu'un projet d'article me donne du fil à retordre, simplement parce qu'il est né d'une idée fumeuse que rien de bien sérieux ne vient étayer. Juste une suite de réflexions anodines basées sur une modeste anecdote de départ. Celle du jour concerne l'homme de ménage (je ne sais comment on l'appelle officiellement) qui nous succède dans nos salles, le soir vers 17h30 quand nous quittons après une journée de cours. Ce monsieur arrive à l'heure où je plie bagages et comme je suis toujours longue à le faire, j'ai largement le temps de l'entendre arriver en poussant sa "servante" ; il chante, il sourit tout le temps et est toujours prêt à échanger quelques mots. Ce que nous fîmes l'autre soir car j'étais, je l'avoue, curieuse d'en apprendre un peu plus sur son compte.
C'est ainsi que j'appris qu'il n'était à ce poste que depuis une dizaine d'années. Avant ?? 
- Vous ne devinerez jamais, me déclara-t-il l'air épanoui.
- ... (j'avais bien une idée, et c'était d'ailleurs pour la vérifier que j'avais entamé la conversation, mais je n'osais pas la lui dire)
- J'ai travaillé durant 28 ans à la Caisse d'Épargne
- ... (timidement) au guichet ??
- Non, non, à la Caisse Régionale de ***, dans les services administratifs.
- Et alors ??
- Et bien, j'en ai eu marre, marre de l'ambiance, des mesquineries, des humiliations inutiles, marre d'être traité comme un moins que rien par mes chefs, j'ai négocié mon départ. L'époque était à la réduction de personnel, et je suis parti dans de très bonnes conditions.
- Et ensuite ?
- Ensuite, j'ai fait une formation et je suis rentré dans l'Education Nationale. Et je suis heureux, vous ne pouvez pas savoir comme je suis heureux : mes anciens collègues m'envient de ne pas avoir eu le courage de faire comme moi. Et puis, vous savez, je gagne à peine moins que si j'étais resté à la Caisse d'Épargne !


Je l'ai laissé à ses plumeaux et à ses éponges, il reprit son joyeux refrain, et le collègue à qui je racontais cela en m'éloignant en fut tout ahuri :
- Comment est-ce possible ? Il préfère ramasser la m... des autres plutôt que de travailler dans une banque ??
Je crois que ce collègue n'a rien compris, trop imprégné d'idées préconçues sur le statut professionnel des uns et des autres. D'abord ce monsieur ne ramasse pas de m..., nous sommes dans des classes tout de même et pas une troupe de cochons dans une bauge. Et puis, la banque, si cela fut prestigieux en des temps reculés, il faut bien avouer que c'est, comme toute entreprise privée, le lieu de beaucoup de tensions et de mal-être au travail.
Quant à moi, victime comme mon collègue d'idées toutes faites, j'étais persuadée que ce monsieur, d'une amabilité et d'une courtoisie jamais prises en défaut, venait de l'hôtellerie ou de la restauration. Mais, et c'est à cela que l'article doit son titre, j'aurais pu aussi bien penser, à sa façon de chanter en travaillant, qu'il avait été peintre en bâtiment.


Quoique... les peintres en bâtiment, et tous ceux que j'ai connus étaient ainsi, eux, sifflent en travaillant. Armée de ce mystère à éclaircir, je me suis livrée au sésame habituel, Google ouvre-toi, et là, chou blanc ! A la question "pourquoi les peintres sifflent en travaillant", rien. Quelques paroles de chanson :

Quand il part travailler
 Je l'entends déjà siffler 
Dans la cage d'escalier 
Des chansons oubliées 
De vieilles chansons d'avant 
Ou des tubes de maintenant 
A n'importe quelle heure 
Il connait tout par coeur 
Tout les matins il sort ses pinceaux 
Il pense à Van Gogh et Picasso 
Il siffle des airs
La journée entière 
 Puis se replonge dans la peinture à l'eau


Une chanson qui rappelle des bons moments 
Que siffle un peintre en bâtiment, 
C'est du bonheur.

J'ai certes découvert que quand un peintre en bâtiment ne pouvait pas siffler, il pouvait faire appel à un siffleur pour peintre. : il n'y a pas de sot métier, n'est-ce pas ! D'aucuns prétendent que, pouvant écouter la radio sur leurs chantiers, ils connaissent tous les titres par cœur... Certes, mais ils sifflaient sans doute avant la radio et d'autres artisans écoutent la radio sur leurs chantiers sans pour autant siffler. La fiche métier de l'Onisep ne m'a pas plus renseignée : s'il y est précisé que, pour devenir peintre, il faut avoir l’œil et le savoir-faire d'un artiste pour harmoniser les couleurs, être doté d'une sensibilité artistique, d'une bonne condition physique, de patience et de minutie, d'habileté et de soin, il n'est nulle part précisé qu'il faut avoir l'oreille juste et savoir siffler !!


J'ai donc pioché du côté de Saint Luc, vous savez l'évangéliste peintre et écrivain qui aurait, selon la légende, réalisé le portrait de Marie et est, à ce titre, devenu le patron des peintres de tous poils. Médecin, converti par Saint Paul dont il devient le disciple, avant de lui succéder et de mourir en martyre à l'âge de 84 ans, il n'est nulle part crédité d'une quelconque propension à l'amour du chant ou de l'expression musicale. Le mystère demeurant entier, j'en suis réduite à des suppositions. On peut imaginer que le peintre, s'il sifflote, c'est qu'il est heureux : son travail est agréable, valorisant, il n'est soumis à aucun stress de productivité, ses efforts sont immédiatement et visiblement récompensés, il est souvent indépendant et ses clients apprécient avec lui le rendu du chantier. Quand on en est à la peinture, ce sont les finitions, le moment agréable où les travaux entrepris prennent forme, et tout cela impulse une bonne humeur communicative dont le peintre est le porte-parole.
En gros, siffler en travaillant, mon "homme de ménage" en est la preuve, est l'indice d'un bien-être au travail qui n'a pas de prix et qui prime tous les autres avantages, fussent-ils sonnants et trébuchants !


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